Coaching & santé mentale — un lien vital
« Il nous reste 10 minutes — qu’est-ce que tu veux absolument garder ? »
« C’est important — 5 minutes maintenant ou priorité prochaine ? »
« J’entends que c’est sérieux. On respire 3 minutes ensemble ? »
« Tu veux partir vite — ancrons l’utile en 2 minutes. »
Le 10 octobre 2025 c’était la journée mondiale de la santé mentale, le thème choisi par l’OMS — « Mental health in humanitarian emergencies » — met en lumière l’urgence de soutenir les besoins psychologiques des populations en crise. En Belgique, bien que préservés de catastrophes majeures, nous faisons face à une autre forme d’urgence :
- 5 à 10 suicides par jour (env. 2000/an)
- Burnout et dépression en hausse
En tant que ‘simples coachs’, qui ne sont ni médecins ni psys, nous pouvons toutefois jouer un rôle préventif essentiel. J’ai récemment obtenu mon certificat de sensibilisation à la prévention du suicide via l’ASBL Un pass dans l’impasse, reconnue par l’AVIQ. Il ne me reste plus qu’à apposer ma signature et à espérer que je n’aurai pas besoin de signaler des personnes qui me confieraient: “Ma famille serait mieux sans moi”. C’est ouvert à toute personne qui accepte le rôle de ‘sentinelle’ et je conseille vivement cet atelier.
Voici quelques tips pour rester en mode sentinelle.
1. Le phénomène de la « poignée de la porte »
La door knob revelation survient en fin de séance, quand un·e client·e révèle une information émotionnellement chargée (« je n’en peux plus », « tout est inutile ») ou montre un désir de fuite.
Cela se manifeste de 2 façons :
- Non-verbale : mains vers la poignée, corps orienté vers la sortie, signe d’impatience.
- Verbale : « Au fait, juste avant de partir je voulais encore dire que… partage chargé émotionnellement »
Ce sont des moments qui révèlent anxiété, résistance, peur du retrait, besoin d’être entendu, ou désir d’éviter l’engagement. Les ignorer fragilise la relation. C’est aussi un test de la relation.
Ignorer ces signaux peut fragiliser la relation et aggraver des états critiques.
Pour cela il est essentiel de bien connaître les limites du coaching, expliquer clairement le cadre de la session, bien structurer la séance (annoncer la fin 10 min avant) et de créer un climat sécurisant dès le début. Cela semble évident mais il n’est pas inutile de le rappeler.
2. Rituel de clôture pratique bien mené :
Un protocole simple pour prévenir les révélations tardives :
- Annonce de fin (10 min avant) : « Il nous reste 10 minutes. Qu’est-ce que tu veux prioriser pour partir serein·e ? »
- Tour de synthèse (5 min) : « Quelle est la chose la plus importante que tu retiens ? Quelle petite action vas-tu prendre ? »
- Check « poignée de la porte » : Observez gestes, postures, phrases de départ. Nommez-les! « Je vois que tu te tournes vers la porte — veux-tu conclure maintenant ? » « Tu sembles pressé·e. On prend 2 minutes pour ancrer l’essentiel ? »
- Stabilisation émotionnelle : 3 respirations profondes, court exercice d’ancrage corporel
- Plan d’action / Parking lot (cahier de notes) : Notez les sujets important à approfondir et proposez un suivi. Notez la révélation, la décision, les To-Do’s.
- Clôture rituelle : phrase de fermeture claire et rappele de rendez-vous : « Merci pour ce moment. On se revoit le [date]. Prends soin de toi. »
3. Scripts prêts à l’emploi
Non-verbaux :
- « Je vois que ton corps s’ajuste vers la sortie. Cela veut dire que tu veux conclure maintenant? »
Verbaux :
- « Merci de le partager. On en parle 3 minutes maintenant ou on planifie pour la prochaine session? »
- « Ce que tu dis mérite du temps. 10 minutes maintenant ou priorité à la prochaine séance ? »
Révélations lourdes :
- « Merci de me le confier. Restons ensemble quelques instants pour te stabiliser. »
- « Ce que tu dis m’inquiète. J’entends que c’est sérieux. On reste ensemble et on trouve une aide concrète maintenant. » 👉 www.un-pass.be – 081 777 150 👉 Centre de prévéntion du suicide – 0800 32 123
- Respecter la confidentialité est important mais aussi les obligations légales (risque de danger, signalement si nécessaire). Pass dans l’impasse peut proposer un rendez-vous avec un.e psychologue, avec l’accord de la personne en souffrance, une fiche alerte peut-être rédigée. La tâche des coachs est d’accueillir, d’évaluer, de reconnaître la souffrance, d’informer sur les ressources et de relayer à des spécialistes. (voir ci-dessous)
Exercice court de fin de séance
Posez ces 3 questions en 2 minutes :
- « Quelle est la chose la plus importante que tu retiens ? »
- « Quelle petite action vas-tu faire d’ici la prochaine ? »
- « Sur 0-10, comment évalues-tu ton état mental maintenant ? »
Et last but not least : le self care des coachs
Après une séance difficile :
- Respirez 2-3 min
- Notez les actions à faire
- Demandez une session supervision ou débrief si besoin avec des personnes chevronnées
- Chez Pass pour l’Impasse, une heure par jour (de 16 à 17 h) est consacrée à des moment de permanence pour les sentinelles
Lors de notre masterclasse Burnout, nous sommes toujours frappé.e.s de l’absence des hommes. Pourtant…
Dans la sensibilisation Pass sur l’Impasse nous avons consacré un moment aux codes de la masculinité face à la demande d’aide
Lorsqu’un homme en détresse envisage ou exprime des idées sombres, il entre souvent en tension directe avec les codes traditionnels de la masculinité. Ces codes façonnent profondément sa manière de percevoir la souffrance, de chercher de l’aide, et même de parler de sa vulnérabilité.
Les principaux mécanismes en jeu :
1. L’injonction à la force
« Un homme, ça tient. »
« Il faut être solide. »
Ce code valorise la résilience solitaire et le contrôle émotionnel.
→ Résultat : la demande d’aide est vécue comme un aveu de faiblesse, une trahison du rôle masculin.
Les hommes peuvent donc :
- minimiser leurs symptômes (« ça va passer »),
- taire leurs idées noires,
- ou chercher des solutions “techniques” plutôt qu’émotionnelles.
2. L’autonomie virile
“Je dois m’en sortir seul.”
“Je ne veux pas dépendre de quelqu’un.”
Ce principe valorise l’indépendance et l’auto-contrôle.
Mais il empêche l’interdépendance — pourtant essentielle à la santé psychique.
L’homme en crise peut ainsi :
- refuser les soins psychologiques,
- éviter les proches,
- et ne consulter qu’en phase très avancée, voire après une tentative.
3. Le tabou de la vulnérabilité
“Les émotions, c’est pour les faibles.”
“Je ne veux pas être un poids.”
Dans le modèle masculin classique (même si ça change un peu), la vulnérabilité est malheureusement encore disqualifiée.
Les émotions comme la peur, la honte ou la tristesse sont perçues comme “non viriles”.
→ Cela crée une anesthésie émotionnelle : l’homme n’a plus accès à ses signaux internes d’alerte ni aux ressources d’expression de la détresse.
Il se retrouve seul avec son chaos intérieur.
4. Le devoir de performance
“Je ne peux pas échouer.”
“Je dois assurer.”
La valeur d’un homme est trop souvent encore associée à ce qu’il accomplit.
Quand il perd un emploi, un statut, une relation, ou son rôle de “pilier”, il perd sa valeur symbolique.
Le suicide devient alors, tragiquement, une manière de reprendre le contrôle — un geste de cohérence avec ce code de “maîtrise ultime”.
5. L’isolement relationnel
Les hommes socialisés dans ces codes ont souvent :
- moins de réseaux de soutien émotionnel,
- moins d’amis avec qui parler en profondeur,
- et des relations souvent basées sur l’action, pas sur le partage intérieur.
Ainsi, la demande d’aide n’a pas de lieu naturel pour émerger.
Vers une masculinité soutenante
Pour maintenir une bonne santé mentale il faut donc aussi redéfinir les codes de la virilité autour de :
- la force d’oser dire,
- le courage d’avoir peur,
- la solidarité entre hommes,
- la fierté d’être humain avant d’être fort.
Ressource clé : Un pass dans l’impasse
Un pass dans l’impasse est une ASBL belge fondée en 2008, reconnue par l’AVIQ, spécialisée dans la prévention du suicide et l’accompagnement psychologique en Wallonie et à Bruxelles. 👉www.un-pass.be
Avec un budget d’environ 1 million d’euros annuel, elle offre :
- Consultations : 20 € (partiellement remboursées) à Bruxelles (antenne depuis 2025), 25 € pour thérapies familiales.
- Deuil post-suicide : Soutien pour enfants, ados et adultes.
- Interventions : Gratuites en écoles, entreprises, prisons, ou pour indépendants en burnout.
- Réseau de sentinelles : 1 800+ formés (2-4h, gratuit) pour repérer les signes (ex.: scarifications).
- Projets : “Échos de Vie” (2025) pour ados à Namur.
- Contacts : un-pass.be, 081 777 150 (lundi-vendredi, 8h30-17h), lignes d’urgence 0800 32 123 (24/7).
Autres ASBL en prévention du suicide
- Centre de Prévention du Suicide (CPS) : Fondé en 1970, ligne 0800 32 123 (24/7), formations pour pros, podcast sur le deuil. Site : www.preventionsuicide.be.
- Les Amis de Zippy : Prévention primaire pour enfants (5-7 ans) via ateliers scolaires. Via http://www.estimedesoietdesautres.be/les-amis-de-zippy.html
- Fondation Serge et les Autres : Accompagnement du deuil post-suicide, groupes de parole. Site : serge et les autres
- Portail Prévention du Suicide : Hub fédéral avec guides et formations (ex.: “Passeport S’équiper pour la vie”)
Burnout : coacher là où ça fait mal.
Les 29 & 30 janvier 2026 à Bruxelles, BAO Élan Vital vous propose une Master Class accréditée ICF pour affiner votre posture, vos outils et votre impact face à ce défi systémique.
🎓 13h CCE – Avec la participation de Pedro Correa.
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